Pourquoi j'écris?
I/ Mon parcours :
L’envie d’écrire m’a pris depuis ma plus tendre jeunesse. Non parce que j’ambitionnais d’être publié un jour, mais parce qu’à force de lire les autres, D’abord les bandes dessinées, puis les romans photos, les rêves suscité par mes lectures d’enfant, ont fait que j’ai pris goût à l’envie de concrétiser cet idéal. Ce fut tout d’abord pour le plaisir de jouer avec les mots. Puis au fil du temps, l’envie de développer ma créativité m’est venue. Mon premier acte a été donc ‘’les cahiers d’amitié ‘’que nous faisaient passer les filles à l’école primaire. Ce fut déjà les prémisses de la poésie naissante inconsciemment en moi. Avec elle grandissait le goût et l’envie de l’écriture. Devenir écrivain fut donc un acte résultant de cette passion que j’ai toujours éprouvé pour la magie qui habite les mots. C’est ainsi qu’au fil du temps ce qui fut au début un passe temps pour combler une enfance solitaire, est devenu un idéal en construction, j’ai continué donc à écrire comme d’autres flirtaient avec les notes de musique à cet âge là déjà. Ainsi l’écriture a commencé à devenir essentielle en moi, sans pour autant envahir mon existence.
Cependant je ne suis pas rentré en écriture comme d’autres enfants rentrent au couvent, parce que je ne pouvais pas imaginer qu’un comorien puisse se faire un jour publier. C’est pourquoi j’écrivais pour moi d’abord, comme d’autres enfants dessinaient pour combler un vide dans le temps et l’espace ; puis pour mon entourage amical qui bien que restreint m’a encouragé. Ce premier acte d’écriture était donc tout simplement pour plaire. Alors commença les échanges. J’ai montré mes textes à mes instituteurs qui m’ont toujours encouragé, et motivé. Avant que je puisse comprendre finalement qu’écrire est tout un art.
Une fois en classe du cours élémentaire, j’ai eu un instituteur qui m’a convaincu en me faisant découvrir la beauté de ce que jadis nous appelions ‘’la leçon de récitation’’.Il fallait jouer le texte que nous apprenions par cœur, et la faire vivre comme on le fait aujourd’hui dans ce qu’on nomme lecture scénique ou mise en espace de texte. J’ai alors découvert des auteurs tels que La Fontaine, puis Victor Hugo ; avec des textes ou des contes comme « Le héron, la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf ; j’étais petit…..etc.…..». Puis avoir lu des auteurs africain comme Sembene Ousmane, Camara Laye et les autres, a fait grandir cette fierté de se voir un jour publier.
J’écris donc pour me libérer de mes fantasmes et vivre de mes rêves.
Le plaisir de me faire entendre tout d’abord, puis celui de partager et / ou échanger ensuite ; ont renforcé cet envie d’écrire et donne un sens à ma vie en la rendant objective.
Un jour j’ai lu quelque part que pour pouvoir donner un sens à la vie, il faut construire une mosquée ; écrire un livre ou donner vie à un enfant.’’ Ce qui a suscité en moi cette envie de marquer à ma façon mon espace et le temps qui me sont impartis. Et pour paraphraser l’autre : « j’écris donc je suis ». Cela me permet aussi de dire les choses telles que je les ressente et de jouer avec les mots comme d’autres jouent avec des pinceaux ou des notes de musique. C’est une aventure dont j’ai connu le début mais qui m’entraine vers des horizons insoupçonnables.
Par contre contrairement à d’autre je n’ai jamais mis dans ma tête d’écrire pour une quelconque gloire. Ma seule ambition étant de voir un jour mes enfants me lire et être fier de leur père.
J’ai toujours été cet enfant solitaire disais – je, qui n’avait pour se confier qu’un cahier, à qui avouer ses joies et ses peines. La poésie a donc été pour moi une fonction libératrice. J’ai compris que je pouvais exprimer dans un poème tout ce que je ne peux dire librement pour plusieurs raisons socioculturelles. Cela sous entend certes une autocensure.
Ecrire enfin me procure certes certaines hantises, celle de la réaction du lecteur, susceptible de me donner cette identité plus ou moins erronée en me jugeant. Peur de la moquerie aussi, parce que mal compris, qu’adopte parfois certaines personnes en nous lisant. Au risque de perdre l’estime des uns et parfois l’amitié de tant d’autres.
II/ LE STYLE POUR MOI C’EST QUOI ?
Cette envie d’écrire est pour moi réconfortée par la réaction du public. Pour exemple, mon poème ‘’ Femme ‘’ a été perçu différemment selon que la réaction vient du public comorien ou étranger (française en particulier). A Moroni on m’a accusé de trop louer, tantôt valoriser l’image que je me fais de la femme, alors qu’à Paris ou Marseille on m’a accusé d’être masochiste. Mais le plus important pour moi a été de constater que je suis lu. Pour moi la critique est une nécessité pour l’épanouissement d’un auteur. Je l’appréhende et le craint quand elle est sincère.
Mon style est un engagement, une révolte.
J’écris, pour retourner la phrase, dire les choses autrement, pour dénoncer ce que mon entendement conteste. J’ai très tôt milité dans des mouvements revendicatifs qui petit à petit ont forgé mon style. D’abord vers les années 78/80 avec le mouvement « Fraternité Culturelle de Moroni - FRACUMO » puis ce fut au tour de la féderation des associations des comorienne, ‘’l’UFAC’’ qui ont marqué ma jeunesse ; et qui plus tard donnera naissance au ‘’Msomwa nyumeni‘’ (Culture nouvelle) qui a été très influant dans la créativité tout domaine confondu de l’époque. Je me considère comme un poète engagé. Mais l’écriture que j’adopte est autant libre. Je n’accepte pas de rester dans un cocon et cherche à me libérer des carcans qui empêchent, voir même étouffe au fond de soi la créativité, même si j’ai un penchant pour la musicalité que peut dégager parfois le vers. Si la nécessité l’exige je n’hésite pas à casser la rime pour libérer le message.
Le style d’expression est une gymnastique, qui me donne deux avantages, celui tout d’abord de me démarquer des autres par ma façon de dire les choses. ‘’J’écris mes cris silencieux’’.Le style me vient comme un bulle d’air et m’aide à m’identifier. Que ce soit en tant que photographe ou homme d’écriture, le style m’amuse, en jouant avec les mots et pour donner corps aux idées. C’est aussi pour moi le message d’une image ou d’une calligraphie. Je suis adepte de la poésie, peu importe son mode d’émanation pourvue qu’elle véhicule le message. Je m’exprime et justifie mon existence.
Par contre la critique me reproche mes phrases trop longues. J’écris naturellement comme cela me vient. Le comorien a son sens du rhétorique qui n’est pas forcement celle d’Aristote ou de Victor Hugo.
III/ MA LECTURE DES ŒUVRES COMORIENNES.
En poésie d’abord j’ai lu respectivement :
Aboubacar Said Salim, pour crimailles et nostalgie ; Aambdou Salam Dossar ; pour Nostalgie ; Saindoune Ben Ali, testament de transhumance ; Mahamoud Msaidié pour le mur du calvaire et l’odeur du coma ; Kamaroudine Abdalla Paune ;pour résonnance et partages ; Ali Ibrahim pour Cliquets et cliquetis ; Jean-Christophe Daoud pour la dernière raison ; Djailane Nassuf pour spirale ; Sambaouma pour poèmes parlés en marge du jour ; Mohamed Anssoufouddine pour Paille- en – queue et vol et Adjmael Ibrahim Halidi.
Pour les autres formes j’ai lu Toihir pour son roman la république des imberbes, mais j’ai aimé beaucoup plus son livre sur les ‘’Je viens’’ et ‘’la place du bangwe’’. J’ai lu par ailleurs Aboubacar pour ‘’ Et la graine’’ ainsi que Sast pour son ‘’ Baoba’’ à Mayotte j’ai lu Abdou Salam Baco. Quand au théâtre j’ai apprécié beaucoup plus ‘’Renard a volé Monsieur le Président’’ de Mohamed Zéyne mais aussi le Mahorais Nassure (au chapeau de colon).
J’estime que l’écriture littéraire comorienne se cherche et qu’elle a de l’avenir devant elle. Il faut reconnaître qu’elle est récente pour ne pas dire mineur par rapport à l’Afrique dont les premier auteurs remontent aux années 50. Si je me résume autrement je la trouve beaucoup plus proche de la réalité historique si je me réfère à Aboubacar Saïd Salim ou Saindoune Ben Ali pour la poésie. Par contre j’ai l’impression que Toihir est beaucoup plus intriguant. Quand à la poésie d’une manière générale je la trouve autant engagée.